Table des matières

CHAPITRE XVI

RESUME EN FORME DE DEMONSTRATION ET DE PREUVE

 

PREUVES DES ORIGINES DES DE THY

De Thy, un des plus vieux noms de France ; l'arbre généalogique de la famille remonte à un certain Simon de Thil vivant au 14ème siècle. Pourtant, les de Thy descendraient, dit la tradition orale familiale, de Jean seigneur de Thil et de Marigny connétable de Bourgogne habitant la forteresse de Thil pendant la première moitié du 14ème siècle. Encore faut-il le prouver.

Comment faire la preuve ?

 On distingue les preuves fondées sur :

-    la déduction. Les preuves sont incontestables si les hypothèses initiales (les prémisses) sont exactes.

-   l'induction qui établit une hypothèse, une présomption étayée par des probabilités ou une accumulation de faits concordants. Une telle preuve, qui peut être réfutée par un seul contre-exemple, contient alors un certain degré d'incertitude.

Pour faire la preuve par déduction il faut que les prémisses du raisonnement soient incontestables et pour convaincre le lecteur de l'évidence des conclusions d'un raisonnement il faut qu'il ait, dans le domaine concerné, le même niveau de connaissance que l'auteur du raisonnement.

Dans notre cas il s'agit de déduire ce qu'implique les règles de droit ou les coutumes en vigueur au 14ème siècle appliquées à des événements de l'époque.

 

REGLES DE DROIT ET COUTUMES AU XIVe SIECLE

Je convie donc le lecteur à se familiariser avec les quelques règles de fonctionnement de la féodalité rappelées ci-dessous:

I Foi et hommage

La foi et hommage est un devoir personnel dû par le vassal à chaque mutation de vassal ou de seigneur ; en sorte que chaque vassal la doit au moins une fois en sa vie, quand il n'y aurait point de mutation de seigneur, et le même vassal est obligé de la réitérer à chaque mutation de seigneur.

D'où on déduit:

Règle n°1 - Chaque fois qu'il y a foi et hommage il y a changement de vassal ou de suzerain. (La cérémonie se termine par l'investiture qui attribue le fief)

 

II Règle de succession pour les bâtards

Les « Etablissements (recueil de coutumes) de Saint Louis » au XIIIe siècle, nous disent :


On en déduit deux autres règles:

Règle n°2 - on ne peut hériter d'un bâtard que si on est son fils légitime ; sinon l'héritage va au suzerain.

Règle n°3 - un bâtard ne peut faire de legs de biens immobiliers.

Il faut que le lecteur accepte l'idée qu'au 14ème siècle on est dans un état de droit et que les trois règles ci-dessus sont incontournables et qu'elles sont à la base des preuves que l'on cherche à établir sur les origines des de Thy.


Cérémonie Foi, hommage & investiture

1) L'hommage était l'acte par lequel le vassal déclarait devenir l'homme de son suzerain. Pour cela il devait se présenter devant celui-ci, se mettre à genou, placer ses mains jointes dans les siennes ; dans cette posture, il prononçait une formule qui exprimait son engagement ; le suzerain le relevait et l'embrassait.

2) La foi était l'acte par lequel le vassal donnait à son engagement une valeur religieuse. Après s'être relevé, il posait sa main droite sur un Evangile ou sur des reliques de saints, tandis qu'un prêtre récitait la formule du serment.

La promesse prenait désormais un caractère sacré : le Moyen Âge ne connaissait pas de pire déshonneur que de violer la foi.

3) L'investiture constituait le dernier épisode de la cérémonie : c'était l'acte par lequel le suzerain concédait le fief au vassal. S'il s'agissait par exemple, de champs, de vignobles, de forêts, il mettait dans les mains du vassal un objet symbolique, une motte de gazon, un rameau de vigne, une baguette de coudrier, figurant le fief.

Dans les premiers temps de la féodalité, le suzerain emmenait alors son vassal sur le territoire concédé, et ce dernier désignant d'un grand geste tout ce territoire, reconnaissait par là le tenir de lui : c'était la montrée des terres.

Mais peu à peu on préféra énumérer par écrit les droits concédés, et la rédaction de cet acte, nommé aveu, remplaça la montrée des terres


 

LA PREUVE QUE JEAN BÂTARD DE THIL

EST LE PERE DE SIMON 

 

Pour apporter la preuve que Simon est le fils de Jean bâtard de Thil on dispose de cinq sources :

Source n°1 : L'inventaire de la partie du terrier de Thy emportée, sans doute par l'épouse de Philibert, en 1792 avant que les révolutionnaires ne brûlent tous les papiers du château de Thoiriat.

Source n°2 : L'Inventaire des titres de la maison de Milly par Oscar de Poli édité en 1888.

Source n°3 : Un texte de Peincédé enregistré aux archives de Dijon.

https://archives.cotedor.fr/v2/ad21/visualiseur/ir_ead_visu_lien.html?ir=23305&id=480750469

Source n°4 : La copie enregistrée d'un dossier constitué par Philibert qui sont des résumés en français de parchemins extraits du terrier de Thy destinés à prouver que la noblesse de la famille remontait au 14ème siècle. Ce dossier a été présenté en 1784 par Philibert à Chérin, l'enquêteur du Roi chargé de vérifier que celui-ci était digne d'être admis à l'honneur de monter dans les carrosses du Roi. Ce dossier a été archivé à la Chambre des Compte de Dijon en 1786 puis transféré aux archives de Dijon quand celle-ci a disparu. Il est probable que Philibert n'a pas reclassé ce dossier avec le reste du terrier  et celui-ci a donc dû être brûlé en 1793.

Source n°5 : Les notes de Chérin, issues de son entretien avec Philibert en 1784, archivées au Bureau Général de la Noblesse de France.

Cette dernière source est certainement la plus crédible, abstraction faite de ce qui peut être identifié comme le discours de Philibert lorsqu’il cherche manifestement à sortir le bâtard de sa généalogie. Chérin a clairement eu accès à la Chambre des Comptes de Paris où ont été transportés en 1524 les registres de la Chambre des comptes du Bourbonnais et ceux du Beaujolais depuis 1400. On le sait parce que Philibert (source 4) y a eu accès lui-même en 1778 ; en effet, il écrit :

« L’extrait en due forme, levé à la chambre des Comptes de Paris le 14 novembre 1778, signé et collationné Peillon de la Garde, conseiller auditeur en icelle, commissaire à ce député, sur les originaux étant aux archives, accordé par arrêt sur requête du 12e du même mois à Philibert Joseph de Thy (qualifié de chevalier), ancien officier de cavalerie, seigneur de Thoirias :

De trois aveux et dénombrements de sa terre et seigneurie, prévôté et juridiction d’Avenas […] »

Cherin a fait lui-même mener une enquête par ses correspondants sur les registres de la Chambre des Comptes du Beaujolais à Villefranche pour la période antérieure à 1400, mais Philibert l’ignore. 

 

De ces sources on a extrait les textes suivants qui vont servir à fonder la preuve que Simon est le fils de Jean bâtard de Thil :

 

Texte n°1 : « 20 Août 1394, 22 janvier et 7 février 1400

 Titres en parchemin et en latin

Le Sire de Beaujeu ayant refusé de recevoir à sa foi et hommage Noble homme Simon de Thy damoiseau pour la terre d’Avenas située dans le Mâconnais et ayant fait saisir cette terre, le dit Simon de Thy obtint un arrêt de la cour du Parlement de Paris le 20 Août 1394 et deux lettres royaux en vertu desquelles il força le dit Sire de Beaujeu à recevoir son hommage et à lever sa saisie ».

C'est le résumé en français de trois parchemins qui ont été extraits du château de Thoiriat en 1792 avant que des révolutionnaires mettent le feu au terrier des de Thy (source 1).

 

Texte n°2 : 1394, 20 août ; - « Lettres royaux obtenues par Simon de Til, damoiseau, contre Edouard, sire de Beaujeu, qui aurait fait saisir la terre d’Avenas, faute de foi et d’hommage par led. Sgr de Til. Original en parchemin. - Ordonnance du juge de Beaujeu, du mois de mars 1400, pour faire exécuter lesd. lettres. » (Berzé, Invent. Reg. XVIIIème s.)

C’est l'item 675 de l’« L’inventaire des titres de la maison de Milly » par Oscar de Poli (source 2)

 

Texte n°3 : « Déclaration Vol 312 Déclaration de l’an 1404 d’Ancellere fille de M. Guill. de Dousa Ch.er femme de feu Humbert de Chaneins damoiseau, laquelle tient en fief de la châtellenie de Bagé comme héritière de Jean bâtard de Til (de Tillio) damoiseau, qui à l’an 1386 vendit au Comte de Savoie la moitié du port de Beauregard (Belliregardi) sur la Saône et ce qu’il avait aud. lieu à la valeur de 20 F de rente qu’il promit reconnaître en fief de la châtellenie de Bagé. (Source 3, Peincédé)

Texte n°4 « ...Celle-ci est connue depuis « Noble Simon de Thil, Damoiseau, seigneur de la Douze en Beaujolais, qui obtint le 20 août 1394 la reconnaissance de la terre d’Avesne, aussi en Beaujolais, reçut en 1401, 1403, 1405 la reconnaissance de divers tenanciers dans la même terre.

Il la possédait depuis le décès de Jean Bâtard de Thil, mort sans postérité légitime. Celui-ci en avait été investi par Edouard, Sire de Beaujeu. Louis II, duc de Bourbon, donataire de ce dernier, prétendit qu’elle lui appartenait, fit assigner Simon de Thil à sa cour. On ignore quel fut l’événement du procès, mais il est certain que la terre d’Avesne passa à ses descendants... »  (Source n°5, texte extrait des notes de Chérin.

 

Ces notes sont prises par Chérin en 1784 au moment où Philibert de Thy lui présente sa généalogie à partir du Mémoire qu'il avait préparé, et laissé pour étude aux bureaux de Chérin avant cet entretien. Il s’agissait de montrer que la noblesse de sa famille était antérieure à 1400 ; c’était une des conditions à remplir pour être admis à l'honneur de monter dans les carrosses du Roi. Dans son dossier Philibert ne parle pas du bâtard de Thil et n'avait certainement pas l'intention d'en parler. Chérin avait cependant fait copier sur le registre de la Chambre des Compte de Villefranche les textes concernant les mutations d’Avenas, précédant celle de 1400, évoquée par Philibert dans son Mémoire. Tout naturellement Chérin, qui avait alors sous les yeux le retracé des mutations concernait le fief d'Avenas et qui voyait que Philibert n'en parlait pas, a dû lui poser une question du genre : « quel est votre lien de parenté avec Jean bâtard de Thil qui était seigneur d’Avenas en 1390 ? ». Chérin a noté soigneusement la réponse de Philibert que l’on peut lire ci-dessus.

Les fils de Philibert ont obtenu en 1820 une copie authentifiée des notes de Chérin, copie qui est actuellement entre les mains d’Henri de Thy. (Source 4)

Ce texte est cité aussi (item 694) dans l'Inventaire de Poli qui a eu accès aux notes de Chérin directement depuis son lieu d'archivage du moment en 1888. 

 

Texte n°5 « La grosse originale du terrier en latin de la seigneurie d’Avenas au diocèse de Mâcon, faite et signée par Dupas ou Depassus, notaire, en l’an 1403 et années suivantes, au nom et profit de Simon de Til, ou en latin de Tillio, seigneur dudit Avenas et qualifié de damoiseau.

Dûment scellé et cotée n°2

 

Note : A ce terrier de 1403, volume 1, recto/verso, il se voit reconnaissance passée par Guillaume de Vibil, de ses redevances envers ladite seigneurie d’Avenas, par laquelle il déclare avoir acquis de Noble homme Jehan de Til ou en latin de Tillio, quondam domicello et domino dicti loci d’Avenas, le mas de la Fleur du Puy.

 

Ce texte est extrait du dossier que Philibert a présenté à Chérin et fait enregistrer en 1786 par la Chambre des Comptes de Dijon, actuellement disponible aux archives de Dijon. (Source 5)

La note est sans doute de la main de Philibert, qui curieusement ne traduit pas l'intégralité du texte qui semble vouloir dire ceci :

...Vibil, tenancier à Avenas, fait reconnaissance de ses redevances envers la seigneurie d'Avenas et fait également reconnaissance de l’acquisition [à titre onéreux] du mas de la Fleur du Puy sur l’ancien jeune Maitre de Maison noble Jehan de Thil, actuellement seigneur d'Avenas.

En d'autres termes il semblerait que Jehan de Thil ait emprunté de l'argent à Vibil, tenancier de terres à Avenas, en lui constituant pour garantie une rente sur le Mas de la Fleur du Puy, rente qui, en l’absence de remboursement, finit, avec les intérêts, par valoir le prix de la terre en cause. Il s’agit donc d’une vente. 

Il s'agit toujours de la succession du bâtard de Thil où tous les biens de Noble Jean de Thil alias Jean bâtard de Thil, damoiseau, sont passés au crible ; ainsi Vibil doit prouver qu'il est entré en possession du mas de la fleur du Puy à la suite d'une vente et non d'un legs d'un bien immeuble (règle n°3) ; ce qui aurait autorisé le suzerain à confisquer le bien.

 

Ce texte est particulièrement intéressant car contrairement à la transcription qui en est faite dans l'Inventaire de Poli qui parle du Mas de la Fleur, ici cette propriété est désignée « le Mas de la Fleur du Puy » dont le Noble Jehan de Thil était « auparavant domicello » littéralement « jeune maître de Maison ». C'était donc la résidence de ce jeune noble. Cerise sur le gâteau, le nom complet a permis de situer cette propriété sur la commune de Fareins à proximité du Port de Beauregard dont le texte n°3 nous dit que Jean bâtard de Thil était propriétaire de la moitié. Ceci conforte l'idée que Noble homme Jehan de Thil et Jean bâtard de Thil ne sont qu'une seule et même personne. Ceci montre aussi que ce jeune noble a été établi sur une terre du Beaujolais d'Empire (sur la rive gauche de la Saône)

 

 
Validation des prémisses du raisonnement :

 

Les deux premiers textes sont des résumés en français des mêmes parchemins réalisés par deux traducteurs différents à des époques différentes.

 

       Le texte n°2 de Poli provient d'un résumé du contenu des parchemins orignaux du terrier des de Thy dont Claude Louis [de Thy de Milly] a fait faire une copie avant 1729. Claude-Louis a probablement fait traduire ces documents à cette époque ; c'est en effet à partir de ces copies qu'il a pu fabriquer sa nouvelle généalogie en intercalant, entre autres, un mariage de Raymond de Milly qui devient le père de Guillaume, lequel était déjà le fils de François selon les autres papiers du terrier.

 Le parchemin d’investiture d’Avenas au profit du Bâtard de Thil existait en 1728. Il avait peut-être été remanié vers 1600 pour en supprimer le Bâtard de Thil, copié en l’état par Claude-Louis qui l’a remanié à son goût. Ce parchemin a disparu en 1792, mais Oscar de Poli, qui travaille sur la copie réalisée par Claude-Louis en fait mention.

 

      Le texte n°1 provient des quelques papiers rescapés du terrier des de Thy. En mars1792 Marie-Claude de Villers-la-Faye doit quitter le château de Thoiriat, où des scellés ont été mis sur ses meubles et ses revenus confisqués. Elle est autorisée en octobre 1792 à récupérer ses vêtements et une partie de ses meubles. Elle sera emprisonnée un an après, mais elle avait pu emporter un paquet de documents que son mari lui avait signalés comme important et les confier à l’une de ses sœurs. Il est probable que les parchemins que Philibert avait extraits du terrier pour constituer le Mémoire destiné à Chérin avaient été rangés avec le reste du terrier qui sera brûlé par les révolutionnaires.

 

Ces parchemins rescapés ont été traduits et résumés en français vers 1820 ; Antoine-Louis a conservé les originaux et deux transcription en français, partagées avec son frère Philippe-Louis ; Henri de Thy a actuellement en sa possession les transcriptions en français ; les parchemins originaux, s'ils existent, sont peut-être chez Robert de Thy.

 

Ces deux textes obtenus par des voies très différentes font référence à la même information ; ce qui authentifie l'existence des parchemins d'origine. La transcription du texte n°2 (item 675 de Poli) « Edouard, sire de Beaujeu, qui aurait fait saisir la terre d’Avenas, faute de foi et d’hommage par led. Sgr de Til. » est un peu elliptique et à la limite du faux sens ou du non-sens. Ce ne peut évidemment pas être Simon qui refuse de prêter foi et hommage alors qu’il s’agit d’une condition nécessaire pour entrer en possession d'Avenas. On se référera donc au texte n°1 pour raisonner.

 

L'information contenue dans le texte n° 3 qui rend compte d'une transaction entre un Jean bâtard de Thil et une Ancelère de la Douze semble incontestable.

 

Dans le texte 4 Philibert, en réponse à une question de Chérin, reconnaît que Simon de Thil a reçu Avenas après le décès de Jean bâtard de Thil mais nie que Simon soit son fils. On n'a pas de raison de contester cette existence d'un Jean bâtard de Thil à cette époque.

 

Dans le texte n°5 Philibert avoue l'existence d'un Jehan de Thil seigneur d'Avenas ; on n'a pas de raison de contester cette information.

 

 

Les règles féodales n° 1,2 et 3 et les textes 1, 3, 4 et 5 sont des prémisses incontestables du raisonnement destiné à établir de façon incontournable que Jean bâtard de Thil est le père de Simon.

On dispose d'informations suffisamment redondantes et fiables pour prouver de deux manières différentes que le père de Simon est Jean bâtard de Thil.

 

Démonstration n°1

 

Le texte n°4 nous dit via Philibert qu'un Jean bâtard de Thil est propriétaire d'Avenas et que Simon

« le possédait depuis le décès de Jean Bâtard de Thil, mort sans postérité légitime. Celui-ci en avait été investi par Edouard, Sire de Beaujeu. »

En dehors  de la précision « mort sans postérité légitime » les informations contenues dans cette phrase sont incontestables ; en effet, on sait qu’Édouard II de Beaujeu a été  suzerain du Beaujolais de 1373, après la mort d'Antoine fils de Marie de Thil et d'Edouard 1er de Beaujeu, jusqu'à sa mort le 2 août 1400. En 1373, si Jean bâtard de Thil était déjà seigneur d'Avenas, il devait prêter foi et hommage au nouveau suzerain Edouard II en remettant symboliquement son fief d'Avenas entre ses mains ; Edouard II, après la prestation de foi et hommage, rend symboliquement le fief en investissant son vassal, Jean bâtard de Thil sur Avenas, ce qui clôt la cérémonie de prestation de foi et hommage.

Note : La propriété d'un fief n'a pas exactement le même sens que la propriété telle qu'on l'entend aujourd'hui. Le vassal tient son droit d'usage sur le fief de son suzerain ; celui-ci peut lui retirer ce droit s'il ne respecte pas les devoirs liés à ce fief.

On ne peut déduire directement de ce texte n°4 et de la règle n°2  (on ne peut hériter d'un bâtard que si on est son fils légitime sinon l'héritage va au suzerain) que Simon est le fils de Jean bâtard de Thil car Philibert nous dit qu'il est mort sans postérité légitime et que Simon  a reçu Avenas par d'autres voies. La seule voie qui paraît possible, selon le droit de l'époque, serait que Louis II, duc de Bourbon, lui ait donné ce fief ; ce qui parait bien improbable.

Croyons cependant provisoirement cette version.

 

On a vu que le texte n°1 est incontestable, rappelons-le ici :

Texte n°1 :« 20 Août 1394, 22 janvier et 7 février 1400

 Titres en parchemin et en latin

Le Sire de Beaujeu ayant refusé de recevoir à sa foi et hommage Noble homme Simon de Thy damoiseau pour la terre d’Avenas située dans le Mâconnais et ayant fait saisir cette terre, le dit Simon de Thy obtint un arrêt de la cour du Parlement de Paris le 20 Août 1394 et deux lettres royaux en vertu desquelles il força le dit Sire de Beaujeu à recevoir son hommage et à lever sa saisie ».

 

Ce texte nous dit qu'il y a foi et hommage ; la règle n°1 nous dit qu'il y a changement de vassal ou de suzerain ; on sait que ce n'est pas un changement de suzerain, Edouard II est sire de Beaujeu de 1373 au 2 août 1400 ; c'est donc Simon qui prétend avoir des droits sur la terre d'Avenas et, de ce fait, celui de devenir le nouveau vassal.

On sait (texte n°4) qu'avant Simon Avenas appartenait à Jean bâtard de Thil, la règle n°2 s'applique ; Edouard II a le droit de confisquer le fief tant que Simon n'a pas prouvé qu'il est le fils légitime du bâtard.

Le texte n°1 nous dit que Simon a obtenu gain de cause en justice et qu'Edouard II doit accepter de recevoir la foi et hommage de Simon donc de l'investir comme seigneur d'Avenas.

L'application de la règle n°2 nous dit que si Simon a gagné, c’est donc qu'il est fils légitime du bâtard.

 

Conclusion ; le père de Simon est Jean bâtard de Thil et Philibert a menti quand il a dit que le bâtard est mort sans postérité légitime.  

 

  Démonstration n°2:


Le texte n°1 nous dit qu'Edouard II a refusé de recevoir à sa foi et hommage Noble homme Simon et qu'il a confisqué Avenas ; il a parfaitement le droit d'agir ainsi dans le cadre d'un héritage si le défunt est un bâtard 

Foi et hommage signifie changement de suzerain ou de vassal (règle n°1). Edouard II est suzerain du Beaujolais depuis la mort d'Antoine, fils de Marie de Thil, en 1373 ; c'est donc d'un changement de vassal qu'il s'agit.

Ce texte nous dit aussi que Simon a fait une action en justice dont la conclusion (Lettres Royaux) lui donne raison et force Edouard II à recevoir l'hommage de Simon ; ce qui signifie que Simon peut prendre possession d'Avenas.

Le fait que Simon ait gagné signifie qu'il a pu apporter la preuve qu'il est le fils légitime d’un bâtard seigneur d'Avenas (règle n°2). On peut en conclure aussi que ce bâtard s'appelle de Thil comme son fils.

Le texte n°3 nous indique qu'un Jean bâtard de Thil cède, dans le cadre d'un héritage, une rente à une Ancelère de la Douze, fille de Guillaume de la Douze. On sait par ailleurs que Simon est seigneur de la Douze ; comme cette seigneurie n'a pas été confisquée par Edouard II, elle lui vient forcément de sa mère. Cette seigneurie appartenant à Guillaume de la Douze, à la mort de celui-ci, la sœur d'Ancelère a dû recevoir le château et verser une compensation pour la part de La Douze revenant à Ancelère. Comme on sait que Simon est le fils légitime du bâtard de Thil, ce dernier était forcément marié en juste noce à la sœur d'Ancelère.

Conclusion : le père de Simon s'appelle Jean bâtard de Thil, seigneur d'Avenas.

 

On pourrait cependant objecter que le procès de Simon aurait pu survenir dans un conflit entre un seigneur d'Avenas et Simon à propos de la vente d'Avenas à Simon. On sait cependant que ce n'est pas le cas grâce à Philibert qui, en répondant à une question directe de Chérin (texte n°4), confirme l'existence d'un Jean bâtard de Thil seigneur d'Avenas : « Il la possédait depuis le décès de Jean Bâtard de Thil »

 

Le mensonge de Philibert : la suite de ce texte n°4 « ..., mort sans postérité légitime... » est en contradiction avec la conclusion incontournable que si le propriétaire d’Avenas avant Simon est un bâtard, Simon est son fils.

Donc Philibert ment il est manifestement décontenancé et bafouille une réponse laissant entendre que c'est à la suite d'un procès, dont on ne sait rien, contre Louis II de Bourbon, qu'Avenas serait finalement allé à la descendance de Simon. Réponse pour le moins curieuse quand les notes de Chérin écrites à partir des réponses de Philibert et du Mémoire qu'il a préparé pour Chérin (Texte n°4) montre qu'il a reçu la reconnaissance de ses tenanciers [d'Avenas] dès 1401 ce qui signifie qu'il était déjà seigneur d'Avenas à cette date; s'il y a eu procès il a dû être rapide car Edouard II est mort le 2 août 1400.

La réalité c’est que, le Beaujolais ayant changé de suzerain le 2 août 1400, tous les vassaux de la baronnie avaient l'obligation de prêter foi et hommage à leur nouveau suzerain. Ce sont les vassaux qui se déplacent chez le suzerain ; Louis II a donc probablement convoqué ses vassaux à sa cour, par petits groupes, pour une cérémonie collective (c'était souvent le cas) ; Simon a dû s'y rendre avec ses Lettres Royaux et prêter foi et hommage au duc de Bourbon. Au retour il a dû se précipiter chez ses tenanciers pour se faire reconnaître comme le nouveau seigneur d'Avenas et encaisser ses revenus qui lui faisaient cruellement défaut depuis sept ans. 

Philibert s'est enfoncé dans un mensonge sans doute parce que, comme tous les de Thy depuis 1600 il est traumatisé par les ordonnances d'Henri IV qui stipulent qu'un bâtard de noble n'est pas noble. La loi n'a manifestement pas été appliquée de façon rétroactive puisque les de Thy ont été maintenus dans leur noblesse par deux jugements en 1667 et en 1698. Les de Thy pouvaient peut-être craindre qu'une nouvelle loi vienne finalement leur faire perdre leur statut. Le fait que le mot « bâtard » soit une insulte a aussi pu participer au choix de Philibert de cacher à tout prix cette « tache de naissance » ; chez les nobles du Moyen Age les bâtards de grands seigneurs avaient un statut et ne ressentaient aucune honte à être désignés par ce qualificatif.

Le discours de Philibert a eu une conséquence car lorsque son fils, Antoine-Louis, a voulu, en 1820, plaider sa cause auprès du Bureau Général de la Noblesse Française pour faire reconnaître qu'il descendait de Jean seigneur de Thil et Marigny, connétable de Bourgogne, on lui a ri au nez en lui montrant les notes de Chérin dont Antoine-Louis a conservé une copie authentifiée qui est arrivée jusqu'à nous.

La démarche d'Antoine-Louis montre à quel point les de Thy s'enorgueillissaient de descendre du connétable.

Cette tradition orale, qui s'est transmise jusqu'à nous, est-elle vraie ? C'est ce qu'il faut maintenant démontrer. Mais avant il faut examiner une autre contrevérité propagée par Claude-Louis, frère d'Alexandre et oncle de Philibert.

Les falsifications de Claude-Louis

Ce traumatisme des de Thy explique sans doute pourquoi Claude-Louis (oncle de Philibert) a cherché à usurper une généalogie Milly en fabriquant des fausses preuves, faciles à identifier dans l'inventaire de Poli tellement elles apparaissent ridicules. Cette usurpation a conduit son fils Nicolas-Christiern à faire toute sa carrière, de bonne foi, en tant que Comte de Milly ; il n'a découvert qu'il avait usurpé son titre que quand Chérin lui a dit qu'il pouvait monter dans les carrosses du Roi sous le nom de de Thy de Milly mais pas comme comte de Milly ; peu de temps après il a fait son testament et il meurt à 54 ans en pleine forme.

A l'époque, usurper un titre de noblesse, c'était aussi grave que d'usurper un titre universitaire aujourd'hui. On peut dire que les falsifications de Claude-Louis qui se sont retrouvées dans l’« Inventaire des titres de la Maison de Milly » ont semé le troubles chez les de Thy après la Révolution.

En effet, ayant perdu presque tous les papiers de famille, ils se sont raccrochés à la version de l'Inventaire qui était plutôt flatteuse ; ils n'ont pas cherché à comprendre ; pourtant, une simple lecture attentive avec un papier et un crayon aurait suffi. Gabriel de Thy de Milly, qui se faisait manifestement appeler, on peut supposer de bonne foi, Comte de Milly, a demandé à Poli de faire l'Inventaire des papiers dont il avait hérité ; à la sortie du livre de Poli en 1888 il l'a lu et ... il est mort (il avait alors 47 ans). Décidément l'usurpation de titre (même après la révolution) a un effet désastreux sur la longévité. C'est sans doute une coïncidence !

Maintenant qu'on a la certitude que Jean bâtard de Thil damoiseau, jeune Maître de Maison au Mas de la Fleur du Puy et seigneur d’Avenas, est bien le père de Simon de Thil, il s'agit de trouver les parents de ce bâtard.

 

LA PREUVE QUE JEAN BÂTARD DE THIL EST LE FILS DE JEAN SEIGNEUR DE THIL ET DE MARIGNY
ET DE JEANNE DE CHATEAUVILLAIN VEUVE DE GUICHARD DE BEAUJEU

Parfois, la preuve de filiation tient à la multiplication des coïncidences dont la probabilité de chacune est faible, pas suffisamment probante individuellement pour avoir une certitude mais qui collectivement ont une probabilité suffisamment faible pour avoir valeur de preuve. C'est ainsi qu'on procède pour prouver une filiation par analyse ADN.

Dans notre cas nous n'avons pas d'ADN mais nous avons des indices qui ont une très faible chance d’apparaître dans une population choisie au hasard.

Profilage des parents du bâtard : on sait que Jean bâtard de Thil Damoiseau est noble, c'est donc un bâtard avoué qui porte le nom de son père. On sait qu'il a été élevé noblement dans le Beaujolais et qu'il y a été établi.

On en conclu que son père s'appelle de Thil, qu'il est probablement de haute noblesse et qu’il n'était pas libre au moment de la conception puisque son fils est bâtard.

On sait par ailleurs d'après les auteurs qui ont écrit sur les familles nobles du Beaujolais qu'il n'y avait aucun de Thil installé en Beaujolais avant le bâtard ; ceci implique que le père n'était pas du Beaujolais.

Sa mère est très certainement une grande Dame de la noblesse suffisamment influente dans le Beaujolais pour y établir son fils ; elle était certainement veuve au moment de la conception car la règle de droit aurait attribué l'enfant au mari de la Dame.

La durée de vie moyenne d'un homme ayant dépassé la petite enfance devait être de l'ordre de 60 ans à 5 ans près.

L'action en justice de Simon n'a pas forcément été très longue ; il avait juste à produire un certificat de baptême et peut-être le certificat de mariage de ses parents pour justifier qu'il était le fils légitime du bâtard de Thil ; il ne s'agissait pas d'un véritable procès nécessairement plus long. On peut donc situer la mort du bâtard autour de 1393 ; ce qui impliquerait une naissance en 1333 à cinq ans près.

Il faut donc chercher une circonstance ayant favorisé une rencontre entre les parents du bâtard.

Il se trouve qu'en 1332 Jean seigneur de Thil et de Marigny (futur connétable de Bourgogne) a accompagné sa fille, Marie de Thil, en Beaujolais pour la marier à Édouard 1er sire de Beaujeu, fils de Guichard de Beaujeu dit le Grand et de sa seconde épouse ; le marié était conduit à l'autel par sa belle-mère, Jeanne de Chateauvillain, veuve de Guichard mort en 1331. Elle a 27 ans et est mère de cinq enfants issus de son mariage avec Guichard. Il semble qu'on a les candidats répondant au profilage des parents de Jean bâtard de Thil.

Sachant que le prénom est un identifiant important des familles, Jean seigneur de Thil et Marigny âgé de 35 ans marié à Agnès de Frolois avec qui il n'a eu qu'un seul enfant, Marie née 12 ans plus tôt, est très certainement le père du bâtard ; il a en quelque sorte signé son œuvre en donnant à son premier fils non seulement son nom mais aussi son prénom.

Jeanne de Chateauvillain a sans doute voulu aussi signer son œuvre en donnant le prénom Simon, marqueur important chez les Chateauvillain, à son petit-fils (fils du bâtard).

On notera aussi que les armes qu'a choisies le bâtard sont d'argent à trois lions de gueules et que celle du connétable sont d'or à trois lion de gueules. Le changement d’émaux de l'or en argent pouvait signifier la brisure liée à la bâtardise.

Il semble que compte tenu du nombre de coïncidences entre le profilage des parents et les candidats proposés il n'y a pas une chance sur un milliard de se tromper.

Bien d'autres indices relient le bâtard à Jeanne de Chateauvillain, veuve Beaujeu.

Ainsi, il paraît impossible qu'il ait pu acquérir un fief appartenant aux Beaujeu sans le soutien de sa mère. Il a en effet acquis la moitié du péage du port de Beauregard, qui est un fief, ce qui confirmait la noblesse du bâtard ; or ce péage appartenait aux Beaujeu, un simple bâtard sorti de nulle part n'aurait pas pu l'acquérir.

On sait aussi par une chronique de Vic-sous-Thil, village situé en Auxois à proximité de la résidence du connétable, que le bâtard et Guillaume de Beaujeu, fils de Jeanne de Chateauvillain, se connaissaient très bien ; ce qui est, somme toute normal pour des demi-frères. Le bâtard a aussi acheté ou fait construire un mas juste à côté du port de Beauregard ; il est repérable puisqu'il a voulu marquer sa noblesse sur une propriété non noble en se faisant construire un pigeonnier, privilège de la noblesse. Ce pigeonnier lui permettait sans doute de rester en contact avec sa mère qui résidait à 10 kilomètre de là au château de Montmelas. Il est à noter qu'à cinq kilomètre du Mas de la Fleur du Puy - c'est le nom qu'il a donné à sa résidence – il y avait le château de Pouilly-le Châtel, la résidence des sires de Beaujeu, où résidait donc sa demi-sœur, Marie de Thil.

Jean bâtard de Thil habitait donc à moins d'une heure de cheval au petit trot de sa sœur et de sa mère ; il faisait vraiment partie du clan Beaujeu.

La fleur de lis sur les armoiries des de Thy

Le bâtard n'avait pas d'autre choix que d'accompagner, comme écuyer, ses suzerains à la guerre. On ne trouve qu'une seule circonstance où il aurait pu être autorisé à ajouter une fleur de lis à ses armoiries ; c'est à la bataille de Poitiers en 1356 ; il avait 23 ans, il était tout à fait en âge d'accompagner son frère aîné Guichard de Beaujeu (frère jumeau de Guillaume).

A la fin de cette bataille il ne restait plus grand monde autour du Roi Jean le Bon, il y avait Guichard et quelques autres grands seigneurs qui se battaient jusqu'à la mort pour protéger le Roi. C'est ainsi que Guichard, assisté de ses écuyers a perdu la vie.  Le Roi Jean le Bon aura remarqué parmi les écuyers le bâtard de Thil se battant comme un lion et l'aura récompensé en l'autorisant à ajouter une fleur de lis bleue à ses armoiries. Cette fleur de lis apparaît donc comme un indice supplémentaire de la proximité du bâtard avec les Beaujeu.

On peut supposer qu'il y avait un autre frère de Guichard de Beaujeu (sans doute Jacques) présent à la bataille de Poitiers car la tradition familiale a véhiculée une histoire laissant entendre que cette fleur de lis a été accordée par St Louis à la bataille de Mansourah où trois frères de Thil, étaient présents et se seraient illustrés. On sait que cette histoire est fausse car les armes du connétable ne comportent pas de fleur de lis. Cette histoire a peut-être été inventée par Claude-Louis de Thy de Milly qui voulait fabriquer une généalogie lui permettant de compter le connétable parmi ses ancêtres sans passer par le bâtard. Pour expliquer la fleur de lis dans les armes des de Thil il a donc probablement inventé une histoire à partir de l'histoire authentique qui, elle, incluait le bâtard.

On peut enfin parler de cette tradition orale des de Thy qui s'est transmise, de générations en générations jusqu'à nos jours : « les de Thy descendent du connétable de Bourgogne. »

Cette affirmation toute seule n'est évidemment pas crédible mais quand elle s'ajoute à tous les indices énumérés précédemment elle devient un indice supplémentaire.

Conclusion : les parents de Jean bâtard de Thil sont Jean seigneur de Thil et de Marigny connétable de Bourgogne et Jeanne de Chateauvillain veuve de Guichard de Beaujeu.


LA PREUVE QUE LA SECONDE EPOUSE DU CONNETABLE N'EST PAS LA JEANNE DE CHATEAUVILLAIN RETENUE PAR LES HISTORIENS

Officiellement Jean seigneur de Thil et de Marigny se serait remarié en 1345 avec Jeanne de Chateauvillain en Champagne dont il aurait eu un fils héritier, Jean de Thil, né en 1345. La découverte que Jean seigneur de Thil a eu une descendance avec une autre Jeanne de Chateauvillain interpelle et nous incite à creuser la question de savoir qui est la seconde épouse de Jean seigneur de Thil et de Marigny.

Cette Jeanne n'était pas née en 1332 car on sait que sa mère n'avait pas encore enfanté à cette date. Elle n'est donc certainement pas la mère du bâtard de Thil. Il n'est évidemment pas totalement exclu que 12 ans plus tard le connétable ait pu faire un enfant avec cette jeune fille âgée de 12 ans au maximum.

Les historiens s'appuient sur deux preuves pour affirmer que cette Jeanne est la seconde épouse de Jean seigneur de Thil et de Marigny :

1° Le testament de Marie, sœur de Jeanne, dont la rédaction a sans doute laissé perplexe bien des historiens ; ce texte en latin par lequel elle teste en faveur de sa sœur Jeanne et après elle de Johannis de Thillo, déshéritant ainsi l’enfant dont elle est enceinte, sent le faux à plein nez.

2° La prestation de foi et hommage de la jeune Jeanne à l'évêque de Troyes pour sa terre de Marigny successivement en 1362 et en 1370. En 1362 Jeanne ne précise pas si elle possède Marigny en usufruit ou en douaire ; en 1370 elle précise qu'elle possède Marigny en douaire et que le nu-propriétaire est un certain Jean de Thil.

Ces deux éléments accréditent l'idée que cette jeune Jeanne est la mère d'un certain Jean de Thil et qu'elle a donc été mariée à un Jean, seigneur de Thil. La foi et hommage de 1370 au nouvel évêque accrédite l'idée qu'elle détient en douaire Marigny et qu'elle aurait donc reçu cette terre du vivant de Jean seigneur de Thil et de Marigny mort en 1355. Ceci signifierait qu'en 1362 sa foi et hommage était motivée par un changement de suzerain ; or on sait que le suzerain, l'évêque de Troyes, est entré en fonction en 1354 et est mort en 1368 ; la foi et hommage sept ans après la mort du connétable ne pouvait avoir été motivée par la prise de possession d'un douaire donné par le mari du vivant de celui-ci. La jeune Jeanne est donc entrée en possession de Marigny en 1362 et n'est certainement pas la veuve douairière de Jean de Thil et de Marigny connétable de Bourgogne.

Jeanne de Chateauvillain en Champagne a menti en 1370 ; il s'agit donc de comprendre pourquoi mais c'est une autre histoire qui concerne également Jean bâtard de Thil et sa mère Jeanne de Chateauvillain veuve de Guichard de Beaujeu (cousine au septième degré de la jeune Jeanne en Champagne); ceci fait l'objet de la seconde partie de cet ouvrage.

Revenons à la famille de Thy dont on peut maintenant compléter la généalogie, représentée ci-après, qui tient compte du fait que si la jeune Jeanne de Chateauvillain en Champagne n'est pas la seconde épouse du connétable il apparaît plus que probable que sa relation avec la veuve Beaujeu n'était pas une simple passade et qu'il se sera marié avec elle en 1345.





Les notes de Cherin






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